Une souris au tribunal

La semaine spécifique «théâtre» du deuxième semestre a donné naissance à une pièce de théâtre dynamique et engagée sur le thème de la responsabilité scientifique. Une souris au tribunal est le fruit d’une semaine d’écriture et de mise en scène conduite par Anne Rougée de la Comédie des Ondes et un petit groupe d’élèves de première année. 

© Dorian Mendes

L’écriture

Il en fallait de la matière pour écrire une pièce entière. Et quoi de mieux que des textes de Supopticien·ne·s pour être joués devant des Supopticien·ne·s? Nous avons donc retravaillé les textes de l’atelier d’écriture mené par Nathalie Westbrook et Anne Rougée. Une soixantaine de textes ont été écrits sur divers thèmes. Certains traitaient de la science, d’autres de la musique ou même du sacré. Nous avons été surpris par l’inventivité et la qualité de ces textes.

Revenons un peu plus en détail sur cet atelier d’écriture. Dans un premier temps, il était demandé aux élèves d’effectuer un travail de recherche sur le thème des « Inventions et Innovations d’hier, d’aujourd’hui et de demain ». Il fallait se concentrer sur un sujet, se documenter, creuser. Puis rédiger un rapport à rendre à Anne Rougée. Par ailleurs, chacun devait, avec 5 mots et 3 phrases, exprimer ce qui l’avait marqué lors de ses recherches. 

5 mots et 3 phrases, cela peut paraître anodin, ce n’est presque rien. Mais c’est bel et bien ceux sur quoi nos camarades ont travaillé durant la deuxième séance de l’atelier d’écriture. Anne Rougée avait fait une sélection parmi les mots et phrases retenus. Certains étaient légers, d’autres satiriques ou encore dramatiques. Il fallait en discuter, y réfléchir, causer un peu sur tout et se sentir libre de s’exprimer surtout.

Une fois que les élèves ont échangé et réfléchi librement, c’était le moment de donner tout son sens à cet atelier. C’était enfin le moment d’écrire. Une consigne seulement : écrivez ce que vous voulez, vous avez 30 minutes. On n’imagine pas ce qu’on est capable de faire en 30 minutes, mais tout ce que je peux vous dire c’est que ces textes ont marqué les esprits lorsqu’ils ont été lus en amphi. Les élèves de première année ont découvert des talents cachés, des proses engagées et parfois même une sensibilité dissimulée, lors de la restitution des travaux d’écriture. 

L’atelier théâtre

L’atelier théâtre a en réalité débuté une semaine avant la semaine spécifique. Il fallait choisir parmi les textes de l’atelier d’écriture ceux qu’on voudrait travailler.  C’était l’occasion pour nous de nous replonger dans les écrits de nos camarades et de redécouvrir leurs discours.  Force est de constater que certains ont fait l’unanimité. C’est le lundi 11 mars que tout a commencé. 

Je me rappelle du premier jour comme celui de la découverte, on apprenait à connaître les autres et à se connaître soi-même. C’était presque étonnant de voir tout le monde jouer le jeu et improviser des scénarios à partir de quelques mots. On a également révélé les quelques textes qu’on avait choisis. Le mien m’a fait réfléchir, celui d’Anaël m’a fait rire. Chaque texte avait sa particularité, sa singularité, son identité. On se demandait encore, comment pourrait-on rassembler ces écrits et en créer un tout ordonné ? 

On avait chacun nos chouchous, nos préférés, mais encore fallait-il se les approprier. On les a donc répétés, plusieurs fois, en changeant le ton, en forçant la voix. Il fallait que ce soit nos textes, qu’on les fasse vivre. Alors on essaie, on tâtonne, on se demande si ça va plaire, si on n’est pas trop ridicule. On ne sait pas vraiment où on va, mais on y va gaiement. Après avoir répété inlassablement son récit, le schéma devient un peu plus précis. On a enfin l’impression que ce texte appris par cœur résonne différemment, un peu plus émouvant.

Tous les matins on se retrouvait et on faisait nos échauffements. Au bout du deuxième jour, je me suis surprise à être un peu plus à l’aise à parler librement. Finalement ce n’est pas si terrible que ça! On commençait à prendre plaisir à incarner nos personnages et à changer de peau l’instant d’une scène. 

En parallèle de l’appropriation il fallait trouver un fil directeur, quelque chose pour lier tous ces mots. Beaucoup de nos textes préférés portaient sur la responsabilité scientifique. On a alors eu l’idée d’une pièce qui s’articule autour d’un procès, celui d’Alain, un scientifique qui a délaissé son éthique. Ne me demandez pas pourquoi «Alain», je ne saurai répondre, en tous cas ce n’est pas en référence à Alain Aspect !  

On a alors voulu raconter la vie passionnante d’Alain, de son enfance à son procès, en passant par la remise de son prix Nobel. Le tout raconté par la petite souris rusée du tribunal. Cette pièce fait écho au grand nombre de questions qu’un scientifique est amené à se poser au cours de sa carrière. On voulait montrer que la science n’est pas seulement utilitaire, mais qu’on peut s’attacher à préserver une science plus contemplative, plus interrogative. On s’attache finalement à Alain qui n’est qu’un passionné que l’ambition a rendu malintentionné.

L’histoire était écrite et on pouvait enfin faire ce qui ressemble à une première répétition sous l’œil attentif d’Anne. On est soulagé, on a l’impression d’avoir bien avancé ! Il ne restait plus que les costumes, les décors, les accessoires, la communication, la feuille de salle… Bref, on avait de quoi s’occuper ! Merci au BDA de nous avoir prêté nos costumes. Certains de nos camarades ont également accepté de donner de leur temps pour nous aider avec les lumières. Merci à Hoffner Jérémie et Chesne Mathias. Certains ont même sorti le saxophone ou la clarinette pour rendre le spectacle plus vivant. Le titre a été trouvé au dernier moment, et on s’est tous accordés pour «Une souris au tribunal».

Le vendredi 15 mars au matin, c’est l’effusion, plus que quelques heures avant de jouer cette pièce, notre pièce. On n’est pas prêt, on oublie son texte, on a le trac. Anne Rougée nous donne ses derniers conseils. Mais celui qui marque les esprits c’est celui-ci :

« Surtout, amusez-vous! »

À midi bon nombre d’élèves sont au rendez-vous. On est intimidés, mais on joue et on y met tout notre cœur. On y avait passé quatre jours et c’était enfin le moment de porter sur scène le fruit de notre travail. Une seconde représentation est prévue le 20 mars, mais au moment de saluer on a tous un pincement au cœur en repensant à cette semaine dans la peau de comédiens et comédiennes. Finalement merci à Anne Rougée, pour son investissement et sa passion, merci à elle sans qui on aurait pas créé ce projet. ■

Membres de l’atelier théâtre:

Marie-Capucine Pomeau
Yousr Gharsall
Alexis de La Bretesche
Anaël Jehel
Maximilien Marcelino
Axèle Fontaine
Marie-Sixtine Coville
Laureen Pradel
Ingrid Bevillard
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